Mais en sociologie, la notion de socialisation detient 1 sens specifique, designant le mouvement avec lequel la societe faconne des individus vivant en le sein. En partant des individus, la socialisation se definit tel le processus par lequel un etre biologique reste transforme en un etre social propre a une societe determinee. Pour le sens, des sociologies durkheimienne et weberienne, qu’on oppose trop souvent Afin de des raisons de commodite pedagogique, partagent le meme grand objectif : saisir comment des formes de relations sociales, plus ou moins durables, fabriquent des « types d’homme » differencies (Max Weber), des « etres sociaux » adaptes a une societe et, plus precisement i nouveau, a toutes les « milieux speciaux » auxquels ils seront destines (Emile Durkheim). En sociologue des religions attache a rendre raison des modes de production et de reproduction des croyances, Weber a longuement analyse, entre autres, le caractere systematique et methodique de l’entrainement ethique impose a leurs membres par les sectes ascetiques. Durkheim, quant a lui, a davantage mis l’accent concernant le role en famille ainsi que l’ecole, en definissant l’education tel « une socialisation methodique en petit generation ».
Meme si les etudes sur la socialisation ne se paraissent pas vraiment organisees en secteur specialise d’la sociologie, nombreux sont les sociologues qui, voili des grands fondateurs d’une discipline, ont cherche a saisir comment des experiences socialisatrices nos plus variees se sedimentent en manieres plus ou moins durables d’observer, de sentir et d’agir (propensions, inclinations, manieres d’etre persistantes, habitudes, ethos, habitus, dispositions, perspectives, etc.), ainsi, De quelle fai§on ces marchandises du passe incorpores par nos socialises determinent en part leurs actions et reactions.
Comment l’heritage vient-il a l’heritier, surtout si votre heritage reste essentiellement « immateriel », constitue de manieres d’observer, de sentir et d’agir, c’est-a-dire d’habitudes corporelles, de croyances, de categories de perception et d’appreciation, d’interets ainsi que desinterets, de gouts et de degouts ? Comment apprend-on, comme, a devenir fille ou femme, futur medecin, paludier, fumeur de marijuana, anorexique, boxeur ou danseuse ? Qu’est-ce qui caracterise les formes scolaires de socialisation via rapport aux formes orales et pratiques de socialisation ? Comment interiorise-t-on nos rapports au monde et a autrui propres a sa classe sociale a travers l’apprentissage de codes sociolinguistiques ? Par quels processus se constituent des valeurs ou des visions politiques ? Comment se socialise-t-on aussi « entre egaux » durant la periode de l’enfance ? Les chercheurs ont travaille sur des aspects tres diversifies d’une socialisation, tant du cote des cadres socialisateurs et des modalites d’une socialisation que du cote des processus d’incorporation ou d’interiorisation vecus avec nos socialises.
Socialisation primaire, socialisation secondaire
On sait que, dans l’existence d’un individu, les divers moments de socialisation ne sont jamais equivalents. Notre sociologie s’est efforcee ainsi de differencier les temps et les cadres en socialisation en separant notamment la periode de socialisation dite « primaire », essentiellement familiale, de toutes celles qui suivent et que l’on nomme « secondaires » (ecole, groupe de pairs, univers specialises, institutions politiques, religieuses, culturelles, sportives, etc.). Cette distinction reste importante en ce qu’elle rappelle que, en premiers moments de la socialisation, l’enfant incorpore dans la plus grande dependance socioaffective a l’egard des adultes qui l’entourent « l’univers, le seul monde existant et concevable, individu bien court » (Berger et Luckmann, 1966) et non un univers percu comme relatif. L’impossibilite de prendre conscience des influences socialisatrices est d’autant plus grande que la socialisation est precoce et n’est jamais soumise a la comparaison. Au Sens commode anastasiadate site (1980), Pierre Bourdieu parlait a ce propos d’« amnesie d’la genese ». Claque que Notre socialisation familiale soit a la fois precoce, intense, durable et, au moins pendant un temps, sans concurrence, explique le poids de l’origine sociale (meme grossierement apprehendee a partir d’une categorie socioprofessionnelle des parents) dans un tres grand nombre de comportements ou de preferences etudies (scolaires, experts, culturels, sportifs, alimentaires, esthetiques, etc.).
Et aussi si elle detient de moins en moins frequemment le monopole de l’education enfantine, la famille ne reste pas inerte avec rapport a toutes les autres cadres socialisateurs potentiels : elle est en mesure de etre plus ou moins controleuse en matiere de « frequentations » ainsi que sorties (surveillant la composition du groupe des pairs frequentables et limitant le temps passe hors de bien controle familial), exercer votre role de filtre par rapport a toutes les programmes televises et operer plus habituellement une activite insensible mais permanent d’interpretation ainsi que jugement via l’integralite des domaines en vie sociale. Meme les professionnels de l’enfance ainsi que l’adolescence (enseignants, pediatres, psychologues, dieteticiens, assistantes sociales, etc.) ne participent a la socialisation des enfants que par l’intermediaire d’la famille qui, tres souvent, a le i?tre capable de d’« en prendre » et d’« en laisser », de resister plus ou moins consciemment a toutes les injonctions exterieures et de traduire les normes qu’on tente plus ou moins explicitement de lui imposer en matiere d’education des bambins. Durkheim avait deja souligne, dans d’la division du projet social (1893), le caractere total et enveloppant du monde familial qui, a la difference d’la corporation professionnelle Prenons un exemple, forme « une sorte de societe complete dont l’action s’etend autant dans une activite economique que via notre activite religieuse, politique, scientifique, etc. Tout votre que nous faisons d’un peu important, meme en dehors d’la maison, y fait echo et y provoque des reactions appropriees ».
- Bernard LAHIRE : professeur de sociologie a l’Ecole normale superieure des lettres et sciences humaines, directeur du Groupe de recherche via ma socialisation